Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
ginalolabenzina.over-blog.com
Articles récents

CAZALLA DE LA SIERRA

15 Décembre 2020

Y a des ouvertures musicales, quatre notes de basse, un son de grosse-caisse en réverb’ … Des rythmes, dans le silence ! Qui s’accélèrent, s’accélèrent ! Un riff de guitare pour surgir d’un coup ! Vlan ! Et tout revient, et mal ! ça fait ! Mal ! Bondir, bondir ! Les retrouver dans la salle obscure, tailladée de lights ! Insouciante et venimeuse jeunesse qui espère tout ! Ne subit rien ! Insolente et insouciante jeunesse qui croit que le monde est parcellé de minerais d’or !… De matières à pomper l’émoi qui nous sent vivre ! Insolente et putréfiable jeunesse, qui ouvre les bras à la nuit ! La traverse d’échos injustifiés et cristallise toute peur, pour négocier avec les ténèbres qui entourent !

Trois coups de grosse-caisse et bondir ! Les retrouver sur un riff de guitare, comme un sourire au rasoir qui entaillerait la nuit de sa lumière !

Où, vous retrouver maintenant que je sais… ?  Maintenant que je suis… de l’autre côté ?

Seule, seule, à arpenter les couloirs aux souvenirs, à me heurter à d’étranges reflets dans les replis desquels, je vous cherche, je vous crois revenir ! Mais non, ce ne sont que des leurres ! Je me goure ! Des châteaux tremblants, des espaces lunaires de vitres déformantes ! L’espace s’est lové sous mes pas et me déporte, déporte ! En des plages désertées où vous ne reparaîtrez plus !

Des larmes frangées d’écume s’arrachent sous le vent de la plage de Cazalla de la Sierra.

Des cris désordonnés, déformés… stridences d’ oiseaux maritimes trouant de leurs becs acérés la chair fraîche et tendre des poissons lune !

Et le crépuscule rougissant qui m’imprime les veines, de son halot de tête décapitée, comme d’un Dieu perdu sur les terres effacées d’Erythrée.

Il sanguinole, ce Dieu perdu, infiniment réduit à une parcelle de poussière, un mince filament de goudron qui s’échappe de la cigarette de Sender, sa bouche aspirant, dans le froid, une haleine de tabac mentholé.

Et les morsures me parcourent, me happent, me déchirent, me désagrègent pour me coucher, vaine, dans notre histoire.

Lyot, peu à peu, s’évanouit, ses traits épousent les reflets en bord d’eau, miroitant parme sur le sable, où une vapeur bruissante de langues en écume, se jettent pour l’inonder…

Ce cri, aïe, ce cri ! En fond de gorge ! Muet, aphone qui m’étouffe ! Me suffoque ! M’asphyxie comme une noyée !

Non ! Sender, plus localisable !

Absent de toute table d’écoute, plus sous radar, plus sur la périphérie, disparu…

Sa voix effacée par les ondes satellites du cellulaire.

Comme cette autre, là-bas, ailleurs, loin, en un autre temps ! Accent lusitanien, senteurs d’une chemise de soie dans Hamra ! Cette voix, là-bas, sous lumières bleues et néons rouges, intermittents, déviant leurs lueurs cendrées, sur la stature énorme d’un taureau noir ! Loco ! L’emblème, l’effigie d’une boîte de Djounieh ! Cette voix, couvrant les mots, entre nous, comme le fracas des allers venus des phares sur la route, tout près ! Cette voix, et ce jet de roses sur mes genoux pour sceller que rien, entre nous, ne pouvait s’inscrire, et, y, rester ! Quitté Beyrouth ! Beyrouth ! L’appart clos de nos présences, de nos ardeurs ! La pellicule d’un film a tout avalé.  

Cette voix … une autre bordure de plage, à quelques kilomètres d’Achrafieh. 

« Stand’s ! stands’ ! stand’s to the radio ! »

Accélère, vite, accélère, fuis ! Cours ! Échappe ! Minette ! Qu’ils te rattrapent plus ! Ces fantômes qui agitent tes nuits d’une bave lourde récurrente ! Ces cris de rapaces en flammes, sans nom ! Échappe toi ! ! Plus personne, plus personne ! Plus rien, sinon le vide qui te traverse et t’agite sans espoir ! Fuis et oublie !

VITE.

Lyot Sender. Paris. 

Illustrations :  "Dada" Francis Gosselin.

Dada concert salle Gaveau, 1920.

Dada and Dadaisme.

CAZALLA DE LA SIERRA
CAZALLA DE LA SIERRA
CAZALLA DE LA SIERRA
Lire la suite

Homo Consommatus

26 Novembre 2020

Elle ferma les yeux. Oublia tout. Le temps. L'espace. Les circonstances. Les combats. Les enjeux… et se perdit aux lisières d'un astre dont la lumière resplendissait du fond de la noirceur des temps. Son temps, là, à deux pas, perdu entre les mains d'homos consommatus, dépourvus de cérèbre.

"Ecce homo"… Dans quelques siècles, étudiant les moulages crâniens de nos contemporains, nos successeurs confirmeront que nos structures osseuses sont, actuellement, en voie de régressions. Plus de sentiments, plus d'inventivité quotidienne, qu'une ardeur vorace, une faim tournante à dilapider l'autre de ce que nos besoins exigent… Plaisir immédiat, insatiable et silencieux, dépourvu de sens,   évacué d'émoi  pour le seul contentement de la sensation immédiate… L'autre, non pas comme fin, mais moyen, pour l’appétit à tuer le temps et les questions urgentes et périlleuses qu'il contient. Car il sait lui, le temps, la dépossession qui nous habite, et nous fait goinfrer à tout ce qui passe avec une frénésie pathologique et névrotique, pour oublier que nous sommes assassins, assassins de vérité et de beauté.

ASSASSINS.

“ La douleur dérange le temps … ” William Shakespeare

 

L.C Lyot Sender. Paris, 2004.

Homo Consommatus
Lire la suite

FATUM

26 Novembre 2020

Fatum ! Ça leur est tombé sur la gueule ! Un matin ! Désolés ! Tout le temps ! La merde, le purin de l’espèce, pas la bonne place pour se l’enfiler ! Non ! Le monde ! L’ autre ! Galaxies impalpables ! Pas pour eux ! Non loin, loin !....

Fatum !

Ils traînent. Savent jamais où foutre les pieds ! Des interrogatifs ! Des espiègles du destin !

Avec eux !  Qu’on morfle ! Rien donner. Non ! Tout gober, aspirer, prendre ! Vloum !

Tétée de la reum , pas finie ! La continue, longtemps ! Longtemps ! Maman ! Encore ! Encore ! Veulent !

Et gloutons de service ! … Et, reconnaissance exigent ! Et mamours, ronrons !  Quantité de trucs qu’ils pleurent ! Pour poser panard devant l’autre ! Alors !  Déviance ! Tout ce qu’est tordu z’attirent ! Z’ont valeurs ! Quand même, ah oui ! Quand même !  Mais quelles ?  Faut suivre… Et rien  leur demander, ces zigues ! Rien ! Pas localisables ! Jamais ! Oh, non ! Transit ! Toujours ! Closed ! Occupés ! Nom de leur troupe : « Z'ont one mission » !  

Laquelle ? Ça !

Réponse : - Because !

L’esbroufe ! Le flou ! Et pataugent, s’embourbent ! Véhiculent boulettes, faute de moyens, indifférence générale, mais tentent sauver martyrs !

Négligés soliloques sont ! Derviches tourbeurs  même ! Tant en massent ! De la fume, de l’excrémentiel !

Côté pile ! L’intime ! Pas triste ! Embringuent les vicelards ! L’inconscient à mesure des moyens ! Houlà !

Compliquent ! Tarabustent ! Sinon rien… ! Z’ont un pote ! Les chante !  Certain ! Qui s’enivre ! Du purin qu’ils lui inspirent ! Vache ! Et créativité génitrice ! Ouais ! Un bec ! Et des couilles  se fait !  Littéraires s’entend ! Pof ! Rentrée ! Métros balisés ! Meilleures ventes !  Prix ! Tout !  Ah ! … Le bec !

Et combien t'en mettent ces porcs ! En mesure ! One ! Two ! De la déclinaison de l’organe géniteur ! Après … Bing ! Pas d'excuses ! Savent dire ! Oh, non ! Rien ! Et te l’ont décoché ! Sclak ! Paf ! Le vif !

L’arcade saigne !

Et le cœur ! Poum ! Ho ! La ! Courage ! Allez, un, deux, le cœur ! Reprends souffle ! Allez ! Bondis ! Fais ressort !  Crie !

« Stand’s ! Stand’s !... To the radio ! »

Aïe ! Paf ! Rien ! …En bas !  Non ! …

Et phlegmon de larmes !... Tu deviens !

L.C. Lyot Sender. Paris, 2004.

Photo d'illustration Charlotte Abramov. Stylisme Romain Liégaux pour Burberry, Dsquared2, John Galliano.

 

FATUM
FATUM
Lire la suite

Spectres sonores.

19 Novembre 2020

Y a des ouvertures musicales, quatre notes de basse, un son de grosse-caisse en réverb …

Des rythmes, dans le silence ! Qui s’accélèrent, s’accélèrent ! Un riff de guitare pour surgir d’un coup !

Vlan ! Et tout revient, et mal ! ça fait ! Mal ! Bondir, bondir !

Les retrouver dans la salle obscure, tailladée de lights ! Insouciante et venimeuse jeunesse qui espère tout !

Ne subit rien ! Insolente et insouciante jeunesse qui croit que le monde est parcellé de minerais d’or !…

De matières à pomper l’émoi qui nous sent vivre ! Insolente et putréfiable jeunesse, qui ouvre les bras à la nuit !

La traverse d’échos injustifiés et cristallise toute peur, pour négocier avec les ténèbres qui entourent !

Trois coups de grosse-caisse et bondir ! Les retrouver sur un riff de guitare, comme un sourire au rasoir qui

entaillerait la nuit de sa lumière !

Où, vous retrouver maintenant que je sais… ?  Maintenant que je suis…

de l’autre côté ?

Seule, seule, à arpenter les couloirs aux souvenirs, à me heurter à d’étranges reflets dans les replis desquels,

 je vous cherche, je vous crois revenir ! Mais non, ce ne sont que des leurres ! Je me goure !

Des châteaux tremblants, des espaces lunaires de vitres déformantes !

L’espace s’est lové sous mes pas et me déporte, déporte ! En des plages désertées où vous ne reparaîtrez plus !

Des larmes frangées d’écume s’arrachent sous le vent de la plage de Cazalla de la Sierra.

Des cris désordonnés, déformés… Des stridences d’ oiseaux maritimes trouant de leurs becs acérés la chair fraîche

et tendre des poissons lune !

Et le crépuscule rougissant qui m’imprime les veines, de son halo de tête décapitée, comme d’un Dieu perdu

sur les terres effacées d’Erythrée.

Il sanguinole, ce Dieu perdu, infiniment réduit à une parcelle de poussière, un mince filament de goudron

qui s’échappe de la cigarette de Sender, sa bouche aspirant, dans le froid, une haleine de tabac mentholé.

Et les morsures me parcourent, me happent, me déchirent, me désagrègent pour me coucher, vaine,

dans notre histoire.

Lyot, peu à peu, s’évanouit, ses traits épousent les reflets en bord d’eau, miroitant parme sur le sable,

où une vapeur bruissante de langues en écume, se jette pour l’inonder…

Ce cri, aïe, ce cri ! En fond de gorge ! Muet, aphone qui m’étouffe ! Me suffoque !

M’asphyxie comme une noyée !

Non ! Sender, plus localisable !

Absent de toute table d’écoute, plus sous radar, plus sur la périphérie, disparu…

Sa voix effacée par les ondes satellites du cellulaire.

Comme cette autre, là-bas, ailleurs, loin, en un autre temps !

Accent lusitanien, senteurs d’une chemise de soie dans Hamra !

Cette voix, là-bas, sous lumières bleues et néons rouges, intermittents, déviant leurs lueurs cendrées, sur la stature énorme d’un taureau noir ! Loco ! L’emblème, l’effigie d’une boîte de Djounieh !

 Cette voix, couvrant les mots, entre nous, comme le fracas des allers venus des phares sur la route, tout près !

Cette voix, et ce jet de roses sur mes genoux pour sceller que rien, entre nous, ne pouvait s’inscrire, et, y, rester !

Quitté Beyrouth ! Beyrouth ! L’appart clos de nos présences, de nos ardeurs ! La pellicule d’un film a tout avalé.  

Cette voix … une autre bordure de plage, à quelques kilomètres d’Achrafieh. 

"Nag ! nag !nag !" ! »

Accélère, vite, accélère, fuis ! Cours ! Échappe ! Minette ! Qu’ils te rattrapent plus !

Ces fantômes qui agitent tes nuits d’une bave lourde récurrente ! Ces cris de rapaces en flammes, sans nom !

Échappe toi ! ! Plus personne, plus personne ! Plus rien, sinon le vide qui te traverse et t’agite sans espoir !

Fuis et oublie !

VITE.

LC. Lyot Sender

Images : Cabaret Voltaire. Spectres Sonores.

Spectres sonores.
Spectres sonores.
Spectres sonores.
Lire la suite

LYOT SENDER. La perche du Nil.

11 Novembre 2020

Lyot, au tout début de leur rencontre, c’est des martiens qu’il lui parlait ! Il était branché direct avec un autre type d’Argonautes !
Un autre espace-temps qu’il voulait lui inculquer ! D’autres facteurs géométriques et physiques qui nous régulaient ! Il était branché, à fond, sur cette aiguille dans un tas de foin, que les Américains avaient voulu nous faire avaler, en 1968, le mystère OVNI. Dantec, aussi, en parle très bien.
Lléna, jusque-là, essayait de suivre.
Pour lui, donc, le monde, aussi, était un cristal interplanétaire, où il inscrivait le déroulement des faits, à sa manière. Fallait pas oublier que Lyot, mon Sender était régulièrement connecté renseignements, services secrets… et que pour lui, la guerre au Koweït, n’avait éclatée qu’à cause d’un OVNI perdu dans le désert de Machintruc ! Que toutes nos connaissances sur Internet nous venaient droit, direct, d’une mégapole saturnienne ! Et que, si les Martiens pouvaient venir nous visiter régulièrement, c’est parce qu’ils avaient réglé les problèmes de clonages depuis belle lurette ! Quand nous n’en étions, nous, qu’à vouloir inculquer à nos pauvres amérindiens du Brésil, que la croix était signe divin !
Ah ! C’était pas triste ça ! Toutes ces déviances autour d’un petit café ! À la nuit tombante ! Quand Lléna n’attendait qu’une chose, qu’il la prenne dans ses bras, qu’il la pourlèche et la saute à n’importe quel endroit de la surface terrienne ! Et Paradis, qu’elle l’aurait surnommé ce coin-là ! Mais, non, lui, toujours branché sur sa longueur d’ondes ! À savoir que, dans la région des Ardennes, sa naissance, même la nuit, même des âmes, qu’il avait entendu respirer !
Là, Lléna, bouche brée ! Mouton, chèvre, grue, stupéfaction qu’elle devenait !
Des trous noirs ! Des vaisseaux irréguliers ! Des avions fantômes ! Des extra-terrestres au premier étage des Down Towers, le jour 11 !
Quand elle racontait ça, très sérieux, à ses copines, elles lui demandaient de laquelle elle avait fumée !
Un moment, elle avait même pensé qu’il avait viré raëlien, ou alors, que c’était l’abstinence conjugale qui l’avait réduit à cet état-là !
Et puis, avec les années, au cours de leurs régulières retrouvailles, ça s’était calmé ! Depuis, Sender était aux prises avec la Perche du Nil, et il remontait la mafia ukrainienne pour nous la débusquer !
Allait-il lui aussi, nous attraper la grippe aviaire ? Lui manquait plus que ça, pour nous retourner les yeux d’une pauvre vierge de l’Oural avec une queue, type serpent plumes, et nous la dévoyer !
Y a des zoziaux, de ces mecs !
La bougeotte à l’arrêt !
L.C. Lyot Sender. 2004.
LYOT SENDER. La perche du Nil.
LYOT SENDER. La perche du Nil.
LYOT SENDER. La perche du Nil.
Lire la suite

L'onde en corset

10 Novembre 2020

Les plus oppressantes sont les ombres de la nuit. Elles se lèvent comme une brume, aux odeurs de soufre.

Un soufre déchu en poussières qui garotte l'haleine des disparus.

Le temps déploie l'ample manteau claveté par les lueurs des trépassés.

Leur cris n'ont plus d'atteinte.

Leur plaies sont terrées dans le silence des plaintes.

La brume a des relents de buée moutarde.

Tout retombe, laissant une rosée amère, qui surnage sur l'étang des grands soirs de la mémoire.

Une bête visite le charnier. Une bête valeureuse, forcée par la vitalité de sa nature, à creuser la terre des charniers, à enfouir le blair dans les corps putréfiés, pour y chercher les notes disparues des poètes.

Un brasil en mitrailles, et tout choit dans les mains du destin.

Le ventre des femmes crie d'avoir porté au monde une chair pour mourir.

Des sanglots de langues de terre remontent des entrailles des collines, où le soleil se lève.

Les lieux sont désertés, le lierre en ronces se les est appropriés.

Le lierre, en pousse légère comme un doigté de vent, souffle l'oubli sur la mémoire qui geint.

Un souffle passe.

Un refrain perdu murmuré, une chanson populaire oubliée, un soufflet de flûte, un doigt sur un ventre accordéoné.

Le temps se déploie, ouvre une mélodie pour rejoindre l'appel.

L'éclat des notes en reflets sur la mare aux guêtres sales, sur le fourmillement des poux qui prennent possession de ce qui fût à jamais disparu…

La bête parcourt les tranches de la terre. La bête renifle cherche. La bête accourt.

Mais plus rien ne l'espère.

Le sol est jonché de blancheur de cadavres. Le sol où l'on ne se retrouve plus.

Alors, s'enfouir jusqu'aux entrailles de la terre, jusqu'au feu puissant qui domine en son cœur, enfourcher la vitalité qu'il nous dicte pour en noyer les tressaillements du jour.

Nouveau, le jour sur une plaie à ciel ouverte, une plaie qui ne s'est jamais refermée.

Est-ce qu'un cri furtif tout en plumes, à l'aube, a puissance à la guérir ?

Le ramage bruissant d'un oiseau inconnu qui porterait en lui, le langage retrouvé du vivre ?

Le sacré de la liberté ?

L'échappée d'un envol, comme ligne pour ciel de paix et de lumière ?

Bleue la couleur ?

La couleur  : celle de deux peaux qui s'étreignent, échappent aux contraintes de l'heure, et puisent au feu sacré de la terre, le folle révolte à recommencer.

C'est ainsi que la plainte génère la vitalité des entrejambes retrouvée, cueillant au secret des attentes, une eau neuve pour tout laver.

Une eau, pour féconder la terre des plus belles ardeurs que la chair contient.

La chair, pour crever de brasiers en fulgurance beauté, l'incarnation qu'elle est venue puiser.

C'est l'heure où les corps se recomposent, où les plaintes ne sont plus qu'attirances au désir.

Les brûlures ? Celles des peaux clouées par la mitraille, celles de deux regards oscultant le règne qui s'inaugure en l'un l'autre.

La bête cherche, la bête trouve où visiter nos craintes.

La bête se plie, se love, se terre au sein du plus secret des corps, en spasmes altérés.

La bête se noie de toutes les humeurs qui fuient de ces corps en hoquets.

La bête active ces flots qui les attachent l'un à l'autre comme une onde en corset,

une armure d'où ils ne sortiront

qu'emmurés.

Illustrations Francisco Goya .

"Disaster of war". 

"The sleep of reason produces monster"

L'onde en corsetL'onde en corset
Lire la suite

LA ROBE L'ARDENTE

8 Novembre 2020

Dans l’étroitesse du couloir chauffé au radiateur à bain d’huile, je l’écoute s’agiter, me frôler. Quelques plis. Elle a la sonorité frêle de quelque chose de ganté. Elle passe en volet sur l’angoisse de la nuit, porteuse d’une étoffe oubliée. Un velours noir, lourd, moiré. Un velours noir sur cape, avec capuche échancrée. Une enveloppe théâtrale. Celle de la cape que porte toute trapéziste à son entrée en scène, pénétrant le cercle de lumière, le halo de l’arène, saluant gracieusement, s’inclinant sous les applaudissements qui soulèvent l’encouragement. Et elle tombe, au sol, sur la poussière, soulevant un léger nuage de parcelles lunaires. Tout est blanc sous les faisceaux tombant du haut du chapiteau.     

Mais là, dans l’étroitesse de ce couloir de l’Ile St Louis, deux étages au dessus des pièces où dorment les oiseaux sculptés de Giacometti, les élégants abats jours qui déhanchent dans la pénombre, là, seule, dans le silence, c’est de noir que cette cape vient m’envelopper.     

La cape choisie en mon année de fin de cycle terminal, l'étoffe élue pour sauter le pas, entrer dans la salle de cours, comme parée pour un autre rôle.

Les oiseaux qui dorment perchés sur les étagères lourdes de reliures d’art, entendent le son et l’écho des ardeurs adolescentes enfouies sous les cascades indomptables, les ruisseaux cascadant des montagnes.     

Le dos collé à la tiédeur du bain d’huile je laisse monter les volutes de ma cigarette, et je pompe à leurs bouts rougis le temps qui s’est enfui. Le temps de la magie des pages des cahiers secrets.   

 Cette cape, je m’en revêtais pour arpenter la nuit, me sentir protégée, redoutable au regard, pour écarter tout ce qui pouvait tenter de m’effrayer sur la route, et regagner la chambre où je m’assoupissais en songes.     

Songes dans lesquels dormaient oubliées l’arène isolée où chacun regardait là-haut, la trapéziste se hisser. Ses jambes enrouler élégamment la corde, ses bas crissant sur les rugosités des lianes, ses bras hissant peu à peu le corps avec un mouvement sûr, jusqu’au trapèze tendu tout là haut. Et puis, une enjambée, un redressement du corps entier, pour se poster droite, sur le haut de l’édifice.     

Et à nouveau l’encouragement de la foule, comme une main maternelle douce et ferme aux premiers pas.   

Il faut s’élancer, sauter, lâcher la corde, et dans l’air libre faire tournoyer les figures.     

Une ronde de velours noir s’enroule à la conscience, ronde, ronde, se figeant sur les axes du chapiteau de la mémoire.

Et la poussière vole. L’or dans l’air s’agite sous les galops de chevaux qui reforment le cercle de ce cirque, dessinent le rouge velours des gradins où les doigts des enfants collants de sucrerie et de confiture, enfoncent leurs ongles de joie, de stupéfaction, de fascination…. Ils sont transis d’amour. Une joie folle les habite pour toutes ces colorations qui tombent du chapiteau, incendiant le bout de leurs pupilles effarés !

Et si je l’étais moi, cette trapéziste qui s’est hissée là haut avec difficulté sur la barre ? Qui regarde le filet en bas et ne se trouble pas ? Qui lève les bras au ciel en s’appuyant sur ses cuisses gainées d’un collant multicolore… et qui va se jeter, se jeter ! L’attraper ce bout de bois qu’on lui lance ! Ce bout de bois comme une branche ! Une branche incendiaire, iridescente où s’inscrit en volet la main ferme du dresseur de fauves.

Une casaque agissante à qui confier mon histoire, une présence en repli aux rosaces d’une branche.

C’est là que le papillon éclos de la larve en poussière, étirant ses ailes neuves de bruissantes couleurs vient lui dire en murmure la plainte des dépouilles des rêves emmurés.

Elle est belle cette histoire, elle est belle et forte comme les jambes de ma mère auxquelles je m’accrochais enfant. Comme la douceur de sa peau qui touchait un instant ma tempe. Comme ces jambes qui m’ont porté en leur ventre, afin qu’à la montée des eaux j’atterrisse là, subitement comme un oiseau pelé sur l’arène.

Et les robes m’ont couverte de leurs plumes, de leurs sonorités, de leurs couleurs et textures et les robes m’ont appris à marcher, à me lever, à avancer, à ne pas me blesser dans mes chutes, à me ressaisir et à me relever.

LA ROBE L'ARDENTE
LA ROBE L'ARDENTE
Lire la suite

Généalogie de l'Image-cristal. Deleuze/ Simondon.

29 Septembre 2020

Le point qui m'a paru essentiel, qui se détache et éclaire notre étude est la question qui porte sur l'individuation.

A la lumière des hypothèses ontologiques de Simondon tout le concept deleuzien s'éclaire, retrouve de sa vigueur, sort de l'abstraction. Nous pénétrons au coeur, au vif de son essence et de toutes les autres lignes qui participent au glissement conceptuel de cette image : l'interdividuel, le Dividuel, l'individuel prennent aussi une autre lumière.

Le point dominant est donc celui-ci : "pour savoir comment l'être doit être pensé il faut savoir comment il s'individue" (cf. Simondon. P.274)

C'est à partir de cette notion d'équilibre métastable (capable d'intégrer le devenir quand l'équilibre stable l'exclut) que l'on comprend le concept de "rhizome" : ce système qui pousse et déborde toujours par son milieu, qui est circulation d'états, procès de contagion, secret comme sécrétion, des expressions deleuziennes que je reprends car elles parlent d'elles-mêmes phénomène de bordure qui renvoie à la fêlure de surface, l'Anomal qui reconjugue, à chaque fois l'hecceité d'individuation : article indéfini + nom propre + verbe infinitif ( cf. Mille plateaux p.324), ce qui me paraît une superbe définition pour qualifier le choc sensoriel : l'émotion.

C'est aussi, à partir de ce processus d'individuation capable de faire apparaître les phases de l'être, à partir de ce système complexe de résonance interne qui induit structuration et résolution sous l'influence du milieu, que l'on comprend mieux cette structure de "l'image-cristal" : miroir et germe.

C'est encore la notion de transduction comme opération physique, biologique, mentale, sociale qui éclaire ces lignes, ces voies par lesquelles on pénètre le cristal.

Et c'est tout le système énergétique du cristal en formation qui permet d'en saisir les effets.

D'autres précisions sont à apporter sur l'influence de Simondon dans le parcours philosophique de Deleuze.

Nous n'avons mentionné que la citation de la p.39 de "L'image-mouvement" omettant de préciser que Deleuze y fait aussi référence p.169,265 et 275 de "L'image-temps", dans Francis Bacon p.86 pour le même ouvrage et sur le rapport moule-modulation que nos avons abordé.

Simondon appartient aux références épistémologiques de Deleuze, tout comme Raymond Ruyer ( cf. "La Genèse des formes vivantes" et "la Cybernétique et l'origine de l'information".)

Simondon est encore mentionné dans "Différence et répétition" p.158 ( moule-modulation) et dans "L'Anti-Œdipe" p.262 pour un autre ouvrage : "Du mode d'existence des objets techniques".

Toutes ces numérotations concernent les ouvrages de Gilles Deleuze aux Editions de Minuit.

Ouvrage de référence : "L'individu et sa genèse physico-biologique" Gilbert Simondon. PUF.1964

Généalogie de l'Image-cristal. Deleuze/ Simondon.
Généalogie de l'Image-cristal. Deleuze/ Simondon.
Généalogie de l'Image-cristal. Deleuze/ Simondon.
Lire la suite

BRANDEBOURG

24 Août 2020

Maman, maman, faut que je me lance, là !

Vraiment ! Ouais ! Maman, maman !

T'attrapes les idées comme on chasse les papillons !

Sous les bombes ! Cassel ! Brandebourg ! Éclats incendiaires au phosphore dans lesquels, petite enfante, tu faillis périr !

Polonaise, tam, ta dam !

Fait pour souffrir, tam, ta dam ! Tra, la, la … ! Sudètes, sans distinction, qui fuyaient ! Fuyaient … ! Déportés plus tard, sur Tchécoslovaquie ! Brassards blancs portaient ! Leur tour ! Même juifs de nationalité allemande ! ça repartait ! Ravage de merde ! Après l’étoile ! Brassard ! Quand en auront fini ces branleurs de l'Histoire ! Hegel fout leur un gnion ! Vlan, apprends leur, quoi ! A diriger l'Histoire ! Quand vont savoir ? Merde ! Pauvres morflent ! Toujours ! Trinquent ! Merde ! Raaaaaak !

Breslau ! Silésie occupée ! Bastion anti-rouges ! Breslau expulsée, vidée, incendiée ! Post Berlin ! Polonais, Ukrainiens, Juifs qu'on re-bousculait ! Assassinait ! Soviets, d'un côté !!! Amerlocks, l'autre !!! Bombes, bombes, ça cramait !!! Raaaaaak !

Et, là, Maman ! Maman enfant ! Y avait pas de cellules de crise pour toi, pour les milliers d'incendiés ! Ah, non ! ça n' Existait pas ! Remettre la cervelle à l'endroit !!!

Pareil en Raaaaaak, aujourd'hui, à cette heure ! Qui s'occupe des mômes, déviés à l'ouest par toute cette brochure !

Au Niger ! Darfour ! Affamés, bouches à mouches, hein ? Hein ?

Maman ! Maman, enfant ! Qui voulait sauter la fenêtre ! Cassel ! Partout ça cramait ! Et ça crame ! Toujours ! Là ! L’heure ! Au feu ! Au feu !

"- Viens, Maman !" Ouais, t'implorait !

Plus jamais, plus jamais ! Seule ! Qu’on t’laisse ! Là ! Sous la brase ! Pas donné assez ! Non ? Plus tard !

Nice, après guerre !

Te traitait en "schleu" !!! Les bofs ! Parce que la gosse, revenue de camp, parlait que l'allemand !

Ah, sainte boffitude de l’effroi ! Suite SS ! Poursuivies tresses blondes ! Aïe ! Aïe ! Même en cour d’école !

Poursuivie, comme là-bas, aussi ! Quand chiens ! Bottes ! Même les chiens, SS !

Et Riviera, là, qui s’la jouait arriérée ! Suite collabo ! Douce ! Douce progéniture !

La métèque c'était toi ! Soudain ! Pourquoi ? Connaissais des sourates ? Traces de pétrole, déjà, dans ta culotte ! Hein ?

Pourquoi ? Qu’ont voulu t’la soulever !! Les Amerlocks !

Quoi ? Quoi ? Ta robe ! Oui, communiante !

Ah, ça ! Aïe !

Depuis qu'en suçant mon pouce ! Découvert … t'observant silence ! Que tu souriais pas. Non pas assez ! Non ! Avec cette première robe blanche d'Hollyway !

Juste avant les dragées ! Tam, tadam !

Aïe ! Fait pour souffrir une polonaise ! Chopin, tralala !

Alors, moi, là, tous les jours, là !!!! Je la mets ! La Robe !

La plus belle, lala !!!

Pour foutre une beigne au premier qui la … Soulève ! Et, oui !

Pour te donner, Maman ! Maman ! Te rendre ! Ce qu'on t'a volé !!!

Volé, t'entends !!!

L'ENFANCE ! L’ENFANCE !

ASSASSINS !

L.C. "La Robe".

“ Qu’y a-t-il de plus merveilleux par une nuit pareille que d’être vierge et jeune, pure, neuve ?"

 

Illustrations :

L'oeil noir. Craig Tuffin.

L'oiseau noir. Inconnu. 

 

BRANDEBOURG
BRANDEBOURG
Lire la suite

KINO SENS 1

22 Août 2020

KINO SENS 1

 

" Reusement !...

Sur le sol impitoyable de la pièce (salon ? salle à manger ? tapis cloués aux ramages fanés ou bien tapis mobile au quelconque décor dans lequel j'inscrivais des palais, des sites, des continents, vrai kaléidoscope dont mon enfance jouait, y agençant des constructions féeriques, tel un canevas pour des mille et une nuits que ne m'ouvraient alors les feuillets d'aucun livre ? plancher nu, bois ciré aux linéaments plus foncés, coupés net par la noirceur rigide des rayures d'où je m'amusais, parfois à tirer des flocons de poussière, quand j'avais eu l'aubaine de quelque épingle chue des mains de la couturière de la journée ?) sur le sol irrécusable – et sans âme – de la pièce ( velouté ou ligneux, endimanché ou dépouillé, propice aux courses de l'imagination ou à des jeux plus mécaniques), dans le salon ou la salle à manger, dans la pénombre ou la lumière (suivant qu'il s'agissait ou non de cette portion de la maison dont les meubles sont normalement protégés par des housses et des modestes richesses soustraites souvent, par le barrage des volets, aux attaques du soleil), dans cet enclos privilégié guère accessible qu'aux adultes – et grotte tranquille pour la somnolence du piano – ou dans ce local plus commun qui renfermait la grosse table à rallonges autour de laquelle toute une partie de la famille s'assemblait pour le rite des repas quotidien, le soldat était tombé.

Michel Leiris. "L'âge d'homme". Gallimard

 

 

Pourquoi débuter un texte qui tenterait de préciser la dimension d'une image filmique, par un fragment littéraire ? Par cette suite de gros plans ou mieux de macro plans, qui mettent en avant les nuances affectives d'une image surgie de la mémoire, autrement dit "une image-souvenir" ?

Incroyable, comment cette chute d'un soldat de plomb, un accident infime, vient s'inscrire là, sur la continuité temporelle d'une durée ! Cette chute devient, sous la multiplicité des images qui s'enchaînent, un véritable kaléidoscope du réel, un hors-temps à charge sensorielle capable de raviver un moment, les trous noirs de la souvenance.

Luminosité, senteurs. C'est une sorte de résonance interne qui s'ébauche alors, avec toutes ses colorations émotionnelles.

Elle vient "courber l'espace et plier le temps", pour tenter de briser l'horizon de cet événement et lui rendre toute sa valeur sensible.

C'est avec une telle analogie, cette chute, - une chute qui pourrait aussi bien rappeler la magie de la pellicule plongeant derrière le viseur du projecteur, ou ce fragment 16 ou 35 mm, répertorié au crayon blanc, qui attend sur le chûtier d'être intégré à la suite articulée d'un film monté -  oui, c'est avec une telle analogie, que nous voudrions aborder le thème du court-métrage.

Nous aimerions attirer l'attention sur ce clivage : la brièveté, la fugacité de l'événement réel, l'intensité sensorielle qui le subvertit, le démultiplie, lui donne sens.

Cette intensité nous la qualifierons de moléculaire. Elle est atomique, de même nature que la gélatine elle-même, preste à retranscrire les tonalités du réel et de l'imaginaire, dans un double jeu de "vu et de non vu, de dit et de non dit, d'actuel et de virtuel".

C'est avec elle et à sa vitesse uniquement, que peut s'engendrer une cristallisation, c'est-à-dire un choc émotionnel qui esquive le temps présent, lui ravit sa primauté pour nous introduire plus avant dans la mémoire et la pensée. Nous échapperions par là, au pouvoir de l'Idée, utilisant ce terme pour limiter tout ce qui relève de l'exploitation d'un gag, d'un jeu qui ne se borne qu'au narratif.

Pour mieux nous faire comprendre, nous allons faire une distinction entre ces deux questions :

 "Que se passe-t-il à la fin de ce temps ? et "Que se passe-t-il durant ce temps ?"

 

 

 

 

"Que se passe-t-il à la fin ?", c'est la question leitmotiv. Quand vous allez voir un producteur, c'est bien celle-là qu'il vous pose :

" - Bon, abrège qu'est ce qui se passe à la fin et quels comédiens pour le casting ?"

Et que se passe-t-il ? Le plus souvent rien, si ce n'est, sous nos yeux hébétés, tous les ingrédients, les clichés exigés par les modes, les rythmes, les sons. Au mieux, une bonne réussite commerciale. Mais à la fin, rien. Un simple retournement, une explication qui limite et abrège le véritable propos filmique, le dote d'une brève et fallacieuse symbolique.

 

L'autre question, "Que se passe-t-il durant ?" peut correspondre à l'une des bonnes questions.

Une question qui permettrait de rendre au court-métrage son entité propre, son champ expérimental et opératoire pour le libérer, enfin, de la tendance générale à le considérer comme le parent pauvre du long ou mieux, son stade préparatoire. Une question pour lui rendre son statut propre, son rythme, son TEMPS.

Ma problématique n'est pas nouvelle, mais reste toujours posée. Elle touche le septième art, la vie, la création en général.

En ce qui concerne le septième art, il est affligeant de le voir se soumettre aux artifices du clip, du message publicitaire, de le voir se dénaturer sous des visées conceptuellement édulcorées.

Nombreux sont les cinéastes qui ont soulevé toutes ces questions et tenté une approche cinématographique différente. Pour eux, prévalait un élément de subversion mieux apparenté aux exigences de l'art qu'à celles du sponsoring.

Me reviennent en tête, les fragment de "Portrait of the Artist as a young man" de Gérard Malanga, les explorations d'Andy Warhol dans "Bufferine", les jeux textuels et vocaux de Peter Greenaway dans "Dear Phone", "H is for House" et cette étrange quête qui anime la seule tentative cinématographique de Samuel Beckette : 'Film".

Toutes ces images reviennent en foule, en appelant d'autres.

En quelques minutes s'initie un jeu avec l'accidentel, le non-dit, l'interdit.

Avec le secret : LE SENS.

Un sens qui brûle trop parfois, comme la pellicule elle-même dans le film de George Landow : "Bardo Follies". Cette image pour signaler la victoire de sa venue . Le sens comme une météorite sur le ciel noir de nos consciences gelées, saturées par le ressassement d'images faussement informationnelles.

 

"…Reusement !"

Ainsi se termine l'extrait de texte de Michel Leiris, précédemment cité car "…Reusement" serait le tempo d'une manière de filmer qui renouerait avec un jeu trop souvent banni et éclipsé.

Un cine-jeu avec le sens, un "Ciné œil". Car "… Reusement" c'est aussi le mouvement que le sens crée chaque fois qu'il plie l'Idée pour apparaître.

Et la bonne question serait celle qui lui frayerait enfin cette voie.

" –Qu'avez voulu dire ?", "Qu'avez-vous voulu montrer qui puisse lever la détresse de sens que connaît notre époque ?"

Nos jours manquent de souffle comme le court manque de temps. A nous de forcer le rythme pour capter les fulgurances et résurgences de l'instant. Car si réponse il y a, elle se cache sous la durée intrinsèque des images et non dans leur enchaînement chronologique

 

 

 

 

 

Trouver "l'image juste", ne plus faire "juste une image".

Une image juste, parce que capable de se libérer de tous les simulacres du cliché pour devenir une sorte d'image "thérapie".

Alors pourquoi avoir tenté d'en extraire le sens avec ce passage de Leiris, qui n'est que littéraire en fin de compte ?

Parce que les mots nous montrent qu'elle doit être de cette nature-là. Elle doit posséder ce pouvoir d'atomisation, de cristallisation, cette fonction d'appropriation et de contagion du réel, pour permettre aux images de se frayer un passage vers la mémoire et la pensée.

C'est ce type de mouvement adapté à la substance filmique qui doit s'immiscer sur nos consciences pour y susciter les déflagrations d'un sens. Un sens en rapport à nos devenirs propres, à nos déambulations

ontologiques.

A faire court ou long, il s'agit de retrouver cette image-là.

Des règles pour la capter ? Il n'y en a pas.

Elles appartiennent aux talents inventifs, au génie du réalisateur. A chacun d'en dresser sa typologie propre.

Il serait prétentieux de dire que le court-métrage doit être au septième art ce que l'aphorisme est à la pensée, mais la question que nous venons de soulever est de cette ordre-là.

Que le court-métrage soir un aphorisme de vie et de sens, langage de poésie, temps d'autoscopie interne pour renouer avec ce monologue intérieur si cher à Pier Paolo Pasolini.

Je laisse à Michel Leiris le soin de clore ces propos, y associant les explorations énigmatiques de "A Walk Trough H" de Peter Greenaway.

 

 

" … que cette chose tombée fût un objet ressortissant de ce monde clos des jouets – qu'on enferme dans des boîtes quand on a fini de s'amuser – à ce monde prestigieux et séparé dont les composants, par leur forme, leur couleur, tranchent sur le monde réel en même temps qu'ils le représentent dans ce qu'il a, peut-être de plus aigu. Monde à part, surajouté au quotidien (…), monde intense, analogue à tout ce qui, dans la nature, fait figure de chose d'apparat : papillons, coquelicots dans les blés, coquilles, étoiles du ciel, et jusqu'aux mousses et lichens, dont rocs et troncs ont l'air d'avoir été paré."

 

 

 

"C'est à l'erreur que je vous pousse, à la sainte erreur… Voici que s'ouvre, dans le soleil rouge d'une après-midi d'automne étouffante, dans une atmosphère de mort, votre fête."

Pier Paolo Pasolini. "Lettre adressée à Antonello Trombodori,

Sdirecteur de la revue " Il Contemporeano", le 7 juin 1956.

 

 

 

Lydie CANGA. Paris. Novembre 1992.

 

Reférences : Gilles Deleuze, "l'image -temps".  Joelle Mayet Giaume "Le fil intérieur" sur Michelangelo Antonioni. Jean Luc Godard pour "L'image juste".

KINO SENS 1
KINO SENS 1
Lire la suite
<< < 1 2 3 4 5 6 7 > >>